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Lettre à ma fille…
Romane,
Le 19 mars dernier, nous avons fêté ton deuxième anniversaire uniquement tous les 3, sans sortir. Tu ne t’en souviendras probablement pas, alors je vais te raconter pourquoi…
Ce jeudi 12 mars 2020 restera gravé dans nos mémoires. Devant notre poste de télévision, comme l’ensemble de la population française, notre Président prend la parole, l’air grave, et annonce que nous sommes en guerre !
Mais ce n’est pas la guerre que nous imaginions. C’est une guerre sans arme, sans armée. C’est une guerre invisible contre un ennemi minuscule mais particulièrement nuisible : le coronavirus ! Virus mortel venu de Chine.
Ce soir-là, le Président annonce la fermeture des écoles et des crèches dès vendredi et ce, jusqu’à nouvel ordre. Pour nous, tous deux entrepreneurs, c’est un coup dur car nous ne savons pas comment gérer ta garde en continuant à travailler. On s’interroge, je m’interroge.
Début mars, beaucoup de bébés sont nés. J’arrive à les photographier en cette fin de semaine. Papa te garde déjà depuis jeudi matin car tu as une otite.
Samedi 14 mars, j’enchaîne 3 shootings dans la bonne humeur.
Pourtant, ce même samedi soir, notre vie va prendre un nouveau tournant. Le Premier ministre annonce la fermeture de tous les magasins non-alimentaires, des bars, restaurants et de tous les commerces non indispensables en cette période de crise. Je vais donc devoir fermer le studio jusqu’à nouvel ordre. Pourtant… le premier tour des élections municipales est maintenu… alors qu’on nous demande d’être prudent et de limiter nos déplacements. Citoyenne modèle jusqu’alors, je ferai pourtant le choix de ne pas voter estimant que cette élection est une vaste fumisterie. Devant ces annonces fracassantes, nous décidons d’annuler nos vacances au ski entre amis. Ma chérie, tu ne verras pas la neige cette année. Le harnais de ski restera lui aussi confiné au Chesnay.
15 jours auparavant, pour tous, le coronavirus était une petite grippe venant de Chine. Pas d’inquiétude à avoir… Le soleil commençait à revenir, les beaux jours aussi. Ce même samedi, la France était encore insouciante et nos esprits aussi.
Lundi 16 mars, le président Macron s’est exprimé une nouvelle fois au JT de 20 heures. Il a annoncé des mesures de confinement dès mardi 17 mars à 12 heures et le report du second tour des élections municipales.
Nous apprenons donc avec stupeur que nous allons devoir être enfermés chez nous, sans sortir, pour éviter de propager ce virus malsain. Cette crise sanitaire prend finalement le même tournant que celle de l’Italie, déjà confinée depuis 10 jours. Nous l’évoquions entre nous, sans réellement y croire pourtant.
Je file au bureau récupérer mon ordinateur et de quoi préparer les heureux événements à venir, après… après tout ça ! Mais quand ?
Les supermarchés se transforment en lieux extrêmement prisés où papier toilette et paquets de pâtes deviennent des produits de luxe (pour une raison que j’ignore).
Sur WhatsApp, les blagues sur le confinement fusent, les fake news aussi. Chacun évoque ses difficultés en arguant surtout des dates de sortie de crise : 45 jours, soit jusqu’au 26 avril ! Je suis donc sauvée pour ma saison des mariages qui doit débuter le 2 mai…
Jusqu’au 1er avril, je garde le moral même si je sais que mon chiffre d’affaires du mois est condamné. Habituellement jour festif et de blagues, je n’ai pourtant plus envie de rire quand 3 de mes mariées de mai m’annoncent le report de leur mariage. Je les comprends, c’est légitime. J’aurai fait pareil. C’est juste que je voulais encore y croire. Ce matin-là, j’ai envie de me dire que c’est une blague, que je vais me réveiller. Pourtant, je suis face à la réalité. Pour elles aussi, le choix a été brutal et douloureux. Préparer une fête plus d’un an à l’avance et devoir y renoncer quelques semaines avant… Mentalement c’est dur !
Je dois aussi reporter les shootings prévus en crèche… mais à quelle date ?
Ce 1er avril, mes larmes ont remplacé mes rires.
Il faut pourtant se ressaisir et apprécier la chose essentielle à la vie : la santé ! Notre famille n’est pas touchée. Nous avons pourtant eu certains symptômes dès le lundi 16 : toux, fatigue, maux de tête, courbatures… miasmes de ton otite ? Légère grippe ? Covid-19 ? Seul le dépistage pourra nous le dire.
Il faut aussi se ressaisir pour toi. Il faut être fort ! Il faut avoir une pensée aussi pour toutes les personnes qui travaillent au quotidien pour notre sécurité et pour sauver nos vies : soignants, policiers, employés de supermarché, livreurs… Tous les soirs à 20h, comme nous, tu applaudis avec enthousiasme pour les soutenir.
Durant ces jours à tes côtés, nous te voyons rire, sourire, grandir. Nous tentons d’organiser des activités : coloriage, cuisine, roller avec papa, trottinette… C’est un vrai plaisir même si ce n’est pas facile tous les jours. L’enfermement en appartement nous rend parfois irascibles. Nous sommes moins patients. On rêve de s’évader, de voir la famille, nos amis, d’être seul aussi ! On pense à l’après et c’est un grand trou noir !
Les informations quotidiennes déversent leur flot de mauvaises nouvelles.
La France compte ses morts, les pleure, et ne peut pas encore les honorer.
La bourse s’effondre, l’aéroport d’Orly a fermé ses portes, les artistes et personnalités commencent à rejoindre la longue liste de décès, les écoles et crèches sont toujours fermées, les boutiques aussi, les examens nationaux seront en contrôle continu les émissions télé en direct se font souvent en visio… en 2020, la France a changé et s’est adaptée.
Dans cette crise sanitaire initialement mal gérée par un manque de masques et de matériel médical surtout, la France se bat. La France s’organise. La France s’active. De belles initiatives naissent, de l’entraide aussi.
55 jours (voir plus) n’est finalement rien à l’échelle d’une vie. Il faut apprendre à relativiser et à remettre les événements en perspective. Etre en guerre en 2020 n’est pas la même chose qu’être en guerre en 1914. En 2020, l’Homme peut rester tranquillement au chaud sur son canapé à regarder Netflix en mangeant des popcorn.
Malgré tout, aujourd’hui, après 3 semaines, le confinement commence pourtant à peser sérieusement sur notre moral. On imagine l’après. Le retour à une vie normale, mais le sera-t-il vraiment ? En fait, on Rêve d’imaginer l’après. On l’imagine festif. On imagine les retrouvailles avec la famille, les amis et ce sentiment nous fait du bien !
Finalement, ce virus nous amène à penser différemment. A voir le monde autrement, à évaluer ses priorités, à créer des souvenirs. Pauvres ou riches, nous sommes définitivement tous égaux devant la maladie. Ce petit virus fait irrémédiablement du bien à la planète. Cette même planète que nous détruisons jour après jour à coup d’effet de serre et de déforestation. Finalement, ne reprend-elle pas ses droits ? Ne devrions-nous pas être confinés une semaine par an pour son bien-être et le nôtre ? Vaste réflexion…
Ma fille, quand tu rentreras à l’école, cet épisode douloureux sera dans les livres d’histoire. Nous pourrons en discuter ensemble car ta mémoire fera défaut. Tu regarderas alors les livres photos réalisés pour toi de ta vie durant ce confinement. Nul doute que tu apprécieras. On en rigolera ensemble.
Ma fille, ma Romane, ne change pas ! Garde ton sourire de petite fille candide. Continue à vouloir faire seule, continue de faire des blagues, continue de faire des petites bêtises qui nous font sourire, continue d’être toi car ensemble, on est plus fort et malgré tout, la vie continue …
Ta maman qui t’aime
Afin de préserver l’image de ma fille, je ne dévoilerai pas son visage sur les photos.
Photographe Versailles – Versailles – Yvelines – Photographe confinée – Photographe enfants – Photographe lifestyle
Beau partage 💕
Bizz
Très beau partage.
Courage à toute la petite famille